The day I met you | Nolan

12 février 2019 - Y'avait tout un tas de cris qui avaient fusé, cette nuit-là, dans la maison des Bruckner. Y'avait cette assiette qui était tombée, cette chaise qui avait volé, les pleurs d'une ère terriblement choquée, les hurlements d'un père enragé. Y'avait beaucoup de tristesse ce soir-là, beaucoup de douleur aussi. Sans qu'on ne lui laisse le temps de s'expliquer, le jeune Jamie était mis à la porte, avec l'interdiction de revenir.
D'une seconde à l'autre, le jeune garçon s'était retrouvé sans rien. Il n'avait plus qu'un sac à dos, avec quelques vêtements et son porte-monnaie, presque vide. Sur ses joues, ses larmes séchaient, dans ses yeux, il n'y avait plus qu'un grand vide qui régnait. Il resta un long moment adossé contre le mur de ce qui était sa maison, il pensait, regrettait, il n'aurait jamais du tout leur avouer, il savait très bien comment cela finirait, mais la vérité, c'était que ça le rongeait, ça l'envahissait, ça l'rendait malheureux, et il n'en pouvait plus de tout garder pour lui. Le jeune garçon avait pourtant espéré qu'après tout ce qu'il avait traversé, ses parents comprendraient, accepteraient, mais il s'était lourdement trompé, et le choc n'en fut que plus difficile à avaler.

Il soupirait, regardait sa maison une dernière fois avant de s'en aller. Le vent transperçait ses vêtements, agressait sa peau, mais il ne s'arrêtait pas. Il ne savait franchement pas où aller, il n'avait pas prévu qu'il finirait sans domicile aussi vite. Pendant plusieurs heures, l'enfant rôdait, tournait en rond, on aurait dit un fantôme, une âme en peine, et rien ni personne n'aurait pu le consoler.

Dans sa longue marche, cependant, il arrivait enfin vers ce qui semblait un refuge, un espoir, au moins pour cette nuit. Sur l'enseigne était clairement notée "Centre d'accueil pour jeunes", sur d'autres papiers placardés aux portes de l'établissement, il y avait un règlement, et quelques autocollants du drapeau LGBTQ+. Il fit rapidement le rapprochement. Un peu hésitant, le brun poussait malgré tout les portes du centre. Il était tard, très tard, pourtant, il eut la chance de rencontrer quelqu'un à l'accueil. Il se dirigeait de cette personne, dans le plus grand des silences. Il n'avait pas besoin de parler, on comprenait ce qu'il venait de traverser. On lui fit remplir un formulaire avant de l'accompagner vers un dortoir. Toujours dans la plus grande des discrétions, il se glissait dans l'un des lits encore libre. Cette nuit-là, Jamie Bruckner fut incapable de trouver le sommeil.

15 février 2019 - Voilà trois jours qu'il était là. Il savait qu'il ne pourrait pas rester au centre toute sa vie et espérait rapidement trouver un nouvel endroit où se poser, mais la tâche s'avérait difficile lorsqu'on était si jeune. Depuis qu'il était parti de chez lui, il n'avait pas parlé une seule fois, son regard se perdait dans l'vide, sous ses yeux, d'immenses cernes trahissaient son manque de sommeil. Il ne mangeait pas non plus, il n'avait franchement aucun goût à rien. Il n'avait reçu aucun message de l'un de ses rares amis de cours. A priori, personne ne semblait inquiet de ne pas le voir à l'école depuis deux jours. Tant pis, Jamie y été habitué.
On l'emmenait à une réunion où d'autres jeunes comme lui pouvaient parler et recevoir des conseils de personnes plus âgées. Il y avait des chaises, un peu de musique, et à manger. Cette fois encore, le jeune garçon n'avait pas décroché un seul mot, il se contentait d'écouter, et ça lui suffisait déjà amplement. La réunion se terminait, mais la plupart des gens restaient et continuaient d'échanger. Jamie, lui, s'était dirigé vers le buffet sur lequel reposait un grand nombre de gâteaux, boissons, et autres friandises. Voilà trois jours qu'il n'avait pas mangé. Il détaillait ces gourmandises du regard, il ne savait pas vraiment s'il pouvait se servir, s'il ne risquait pas de tout vomir en essayant de manger, il ne remarquait même pas qu'une autre personne que lui s'approchait elle aussi du buffet.

J'avais ma double-vie, en quelque sorte. Celle du Nolan qui s'éclate, qui passe toutes ses soirées en boîte où dans les bars, la plupart du temps pour finir avec un mec, des fois juste pour finir totalement ivre mais bien. Et il y avait le Nolan qui était bénévole au centre LGBT, et qui s'occupait des jeunes en difficulté. Des jeunes qui passent par le même malheureux chemin qu'il avait également emprunté. Difficile de croire qu'autant de parents, de proches, peuvent être aussi intolérants au point de rejeter la chair de leur chair, leur enfant, tout ça parce qu'il a l'indécence d'aimer. Ça, j'avais toujours trouvé ça profondément injuste, et même si je passais mon temps à faire le mec qui s'en branle, je savais par quoi ses gamins passaient. Le choc, le désespoir, puis l'errance. Le sentiment d'etre un monstre, d'avoir déçu tout le monde. Avec le temps, on apprends à vivre avec le regard de ces gens, de cette famille qui nous a renié. Le principal dans tout ça c'est de rester fort, soi même, et surtout, ne jamais penser qu'on est anormal. Il faut faire des minorités une force, comme on dit... Minorité ne veut pas dire anormal.

J'avais entendu de la part des autres membres de l'association qu'un gamin était arrivé la veille, le soir très tard, au centre. Avec son sac et le minimum pour vivre. Et ce gamin, je l'avais vu, à la réunion. Pas très bavard, et ça, je peux le concevoir après quelque chose comme ce qu'il vient de lui arriver. Les autres avaient parlé, échangé, mais je n'avais vu aucun mot sortir de sa bouche. Il était plutôt mignon, ce gosse. L'air profondément innocent. Et brisé. Les deux parts de moi même m'en parlent, l'une me faut compatir, et l'autre me susurre qu'il est sûrement l'une des proies sur lesquelles j'aurais sauté dans d'autres circonstances.

À la fin de la réunion, je le vois s'approcher du buffet, semblant hésitant, à l'écart des autres. Alors je m'approche, et je me place juste à côté de lui, me servant un des gâteaux.

- Hey, comment tu te sens ?

Je le regarde. Pas de présentation à faire, je l'avais fait en réunion. Si il avait écouté, il savait comment je m'appelais. Je tourne la tête vers lui, et l'affuble d'un sourire plutôt doux et rassurant. Après tout... Il a autant besoin d'aide que moi, à l'époque. Et j'étais aussi là pour ça.

- Tu peux te servir, c'est fait pour ça

Il n'aimait pas être dans un état comme ça, Jamie. Certes, il n'avait jamais été un garçon de nature très joyeuse, mais se sentir sombrer comme ça, ça le dégoûtait, il aurait tellement aimé que les choses se passent autrement. Déjà, s'il avait pu changer quelque chose à sa vie, il se serait fait bien plus extraverti, bien moins timide et renfermé, ensuite, il aurait bien pris garde à ne pas aimer les hommes, jamais.
Mais il était comme ça, et ne pouvait plus changer. Il avait déjà essayé d'être plus abordable, mais on sentait trop facilement son malaise lorsqu'il engageait une conversation. De toutes façons, on le trouvait déjà trop étrange, on ne voulait pas vraiment rester avec lui, et il s'était fait une raison, ça, ce n'était pas si grave.

Mais aimer les hommes l'était bien plus. Il se sentait comme un monstre, comme un indésirable, et il se demandait alors une nouvelle fois s'il méritait de vivre. Plusieurs fois durant la réunion, il avait regardé ses poignets. Ce qu'il regrettait ses cicatrices, pourtant, au moment où il se faisait souffrir de la sorte, il se sentait si bien, il se sentait partir, et c'était la seule chose dont il avait envie dans ces moments-là.

Il n'aurait jamais pensé qu'une personne l'aborderait à la fin de la réunion, il pensai faire fuir tout le monde, déjà, en temps normal, on ne s'approchait pas de lui, on avait pas spécialement envie d'échanger avec un garçon aux airs si taciturnes, mais en plus de cela, aujourd'hui, il n'était clairement pas au top de sa forme, clairement pas apte à discuter. Il allait pourtant devoir faire l'effort, il n'était pas un sauvage, et lorsqu'on lui adressait la parole, il répondait.

Jamie tournait la tête pour voir son interlocuteur. Ce dernier était sans aucun doute plus âgé, assez beau, c'était étrangement la première chose qui avait frappé le plus jeune lorsqu'il le vit. Il n'aimait pas se retrouver dans ce genre de situation, et c'était tout son petit cœur qui palpitait. Le plus grand lui demandait comment il se sentait, et Jamie répondait immédiatement. "Mal, j'imagine." Ca ne servait à rien de mentir, la tristesse se lisait sur son visage assez facilement, il ne cherchait même pas à le cacher. Il l'invitait ensuite à manger, c'était gratuit, il en avait entièrement le droit. Jamie savait tout ça, mais ça n'changeait rien, il y avait comme un blocage, il avait peur que tout son corps ne puisse pas être prêt à recevoir quoique ce soit, pas même un simple petit gâteau. "Je sais." Disait-il doucement, il tendait le bras vers l'une des gourmandises, sans pour autant la porter à ses lèvres, il voulait maladroitement faire croire à l'autre qu'il mangerait un peu, mais il n'en ferait rien. "Je n'ai pas très faim." Il gardait tout de même le biscuit entre ses doigts, peut-être changerait-il d'avis, même s'il était persuadé du contraire.

Tâchant de sourire légèrement, pour ne pas avoir l'air totalement désespéré devant ce beau garçon, le jeune Jamie s'écartait alors du buffet, ça ne servait à rien de rester devant de toutes façons. "Et tu es ?" Plutôt sympathique, il ne pouvait pas le nier, mais il était assez intimidé aussi, malgré les apparences qu'il cherchait à se donner.

Il n’était pas bien bavard, et je pouvais le comprendre, après tout, après avoir vécu ce qu’il venait de traverser. Mais on s’en relevait tous, ce n’était pas une fatalité. J’avais appris à vivre avec, à remonter la pente, grâce aux autres, et maintenant je suis fier d’être ce que je suis. Pourquoi je devrais être quelqu’un d’autre ? Pour plaire aux gens qui m’ont reniés ? Jamais. Je suis devenu quelqu’un d’authentique. Alors oui, je sors, je bois, je baise, je passe ma vie à ça, mais vous savez quoi ? Je m’éclate. Je ne m’ennuie pas une seconde. Je saisis l’instant présent, à chaque minute de ma vie, et aujourd’hui, je suis plus heureux que je ne l’ai jamais été. Parce que je suis moi-même, et qu’aucune personne faussement bienpensante n’allait me barrer la route. Lui, il était au début du chemin. Mais on allait l’aider, lui faire remonter cette pente douloureuse qu’il est en train de traverser. Chaque homme à sa fatalité, et on en ressort toujours plus fort. Rien ne nous est donné à même le bec, comme on dit.

Il me dit qu’il va mal. Evidemment, et je n’en relève pas plus de ses mots. Je ne m’attendais pas à autre chose, en réalité. Malgré tout, il continue tout de même la conversation, contre toute attente. Au moins, il ne se ferme pas totalement, et c’est une très bonne nouvelle. Je le regarde alors, et je lui souris.

— Nolan. Nolan Benson. Je suis bénévole ici, pour aider les p’tits gars comme toi.

Ca contrastait énormément avec l’image que je me donne habituellement. Je suis quelqu’un de très nonchalant, je m’en foutiste au possible, je fais ce qu’il me plaît, quand ça me plaît. J’enchaîne les boulots plus ou moins honnêtes, je m’amuse chaque soir de la semaine, je ramène un mec différent chaque soir, parfois. Je bois, je me drogue, mais tout ça, ça reste de l’amusement. Pas une addiction, non, loin de là. Je suis juste un incorrigible fêtard, et ça, on ne peut me l’enlever. Je déteste la morosité, alors je fais aussi mon possible pour l’évincer chez moi, et chez les autres, quand elle est là. Mais si je fais ce job, c’est aussi parce que je sais ce qu’ils vivent, et ce par quoi ils sont passés. Et je suis fier de ce que je suis, alors tout le monde devrait l’être. Nous sommes ce que nous sommes, et c’est ce qui nous rends uniques. Personne n’a le droit de déprimer parce que quelqu’un ne l’aime pas. Alors oui, si ce sont nos parents ? Et bien les liens du sang ne font pas tout. Si il faut continuer sa route seul, alors soit. Il suffit de bien s’entourer, de gens qui vous font ressentir que vous êtes quelqu’un d’important, et pas une erreur de la nature. La nature, c’est nous. Elle est variée, elle est éclectique. Il faut en être fier.

— Et toi ?

Je lui souris sincèrement, je veux le mettre en confiance. Il est super mignon, comme gosse, en plus. Il aurait un succès de dingue… La drague aussi, servait à ça. A se sentir attirant, aimé, pour ce que l’on est. Il avait un charme évident. Mais avec un sourire, ça devait être encore mieux.

— Mes collègues m’ont dit que tu n’avais pas trop parlé depuis ton arrivée. J’comprends, mais si t’as besoin de parler, je suis disponible. On est là pour ça. Et aussi pour t’aider. Alors n’hésite pas, ok ? Je suis là encore jusqu’à dix-neuf heure ce soir.

L'homme qui lui faisait face était spécial, vraiment. Depuis que Jamie était arrivé, c'était le seul qui était venu le retrouver après l'une des réunions. Ça n'avait pas l'air intéressé, c'était seulement de la bonne volonté, et même s'il ne se l'avouait pas, ça l'avait touché. Il fallait dire que le plus jeune avait pendant longtemps manqué d'affection, alors, aujourd'hui, lorsqu'on lui en donnait, même un tout petit peu, ça lui faisait du bien, tellement de bien.

L’aîné se présentait, il l'avait sûrement fait auparavant, pendant la réunion, mais Jamie était discret, bien trop occupé par ses pensées, par ce souvenir qui le hantait, ce soir-là où il était devenu un inconnu aux yeux de ses parents.
Nolan. Cet homme s'appelait Nolan, et le brun se promettait de s'en souvenir cette fois. Il avait bien écouté, il ne comptait pas l'oublier. Sans s'en rendre compte, il lui offrait un sourire, très léger, tout juste perceptible, lorsqu'il lui demander de se présenter. "Jamie. Un peu gêné, peut-être embarrassé, il ne savait pas trop que faire de ses mains qui se serraient et se desserraient nerveusement. Il attrapait alors un autre gâteau qu'il faisait passer d'une main à l'autre. Oui, ce Nolan l'impressionnait, l'intimidait, car il avait l'air de n'avoir aucun souci, il avait l'air heureux, si heureux, et il était beau, si beau, il l'avait pensé à l'instant même où l'autre l'avait abordé. Dommage qu'il était aussi mal à cet instant précis, sinon, les choses se seraient sans doute passées autrement.

La vérité, c'était que Jamie n'avait jamais vraiment eu l'occasion de draguer, de séduire. Il était tombé amoureux de ce garçon, dans son école, mais ça n'avait pas aboutit, ça avait même d'ailleurs empiré les choses, et il s'était renfermé sur lui-même, n'assumant pas qu'il aimait les garçons. Il n'avait d'ailleurs jamais essayé de séduire une fille, il n'était pas parvenu à faire semblant, à se convaincre que c'était ça qu'il aimait. Alors, il n'était ni doué pour la drague, ni doué pour la reconnaître. Evidemment, son vis-à-vis cherchait seulement à l'aider, pas à le séduire, mais il se disait bien que si lui, ou un autre, tentait d'aller un peu plus loin avec lui, il ne serait pas en mesure de le comprendre, ou du moins, pas de suite.

Et Nolan continuait la conversation, lui proposer de discuter, mais Jamie avait encore du mal à mettre des mots sur tout ce qui s'était passé. Pourtant, il en avait envie, il voulait parler, il voulait lui parler, à cet être qui s'était arrêté un instant pour le voir, à cet être qui avait prit le temps de lui demander comment ça allait. Jamie se mordait la lèvre inférieure, reposait le gâteau qu'il avait prit. "C'est difficile." Ses yeux se plongeaient dans ceux du plus âgé. Ils étaient beaux, si clairs, les siens semblaient bien banals à côté, tombants, cernés, comme lui, il avait tout à envier à cet homme face à lui. "Je veux bien parler... Mais pas ici, je ne me sens pas à l'aise." Sans lui demander son avis, Jamie s'en allait alors de la salle de réunion et se dirigeait vers la petite cour. Il n'était encore jamais sorti du centre depuis qu'il était arrivé, il avait trop peur d'affronter le monde extérieur, en revanche, il aimait cette cour, peu de gens connaissaient son existence, ça lui permettait de prendre l'air sans être dérangé. "Ici... C'est mieux." Tout son cœur palpitait, il éprouvait cette envie de parler, pourtant, il ne savait pas comment commencer, mais il ne pouvait pas faire machine arrière, il l'avait emmené jusqu'ici. "J'aurais jamais du leur dire... A mes parents... J'ai que dix-sept ans, j'suis qu'un gamin" Sans avoir réfléchi, le jeune lui avait fait part de ses craintes, de ses doutes, il ne se sentait pas capable de gérer tout ça. On ne lui avait jamais appris à se débrouiller tout seul, à chercher un appartement, un travail, à payer des impôts, des factures, il était perdu. "Comment on doit faire ?"

C’est difficile, bien sûr que c’était difficile. Qu’est-ce qu’il y avait de plus difficile que de se faire rejeter par sa propre famille pour quelque chose de normal ? Pour des sentiments que l’on ne contrôle pas ? Je le regarde, dans ses gestes, il a l’air encore bien sous le choc. C’était sûrement très récent. Il faut du temps pour se remettre de tout ça et accepter la situation… Ce n’était pas si simple. Puis ses yeux se relèvent dans les miens, semblant fatigués, usés, ternes, pas illuminé par la moindre étincelle. Encore un homme qu’il allait falloir relever, et remonter jusqu’au sommet. Si j’avais réussi, tout le monde pouvait le faire !

Puis finalement, il me dit qu’il souhaite parler, mais pas ici. Ce que je peux comprendre, en général, on s’entretient à deux, c’est plus intime et on se livre plus facilement concernant ce genre de sujet. Alors quand il quitte la pièce, je le suis. Il sort dans la cour, et je me met face à lui, profitant de l’air frais extérieur. Là, ils étaient seuls, et ça ne pouvait être qu’une bonne chose pour qu’il se livre entièrement. Ce que le jeune gars fit très vite, commençant par un aveu sur ses parents.

C’est toujours le premier regret qu’on a. Mais c’était reculer pour mieux sauter. Comment aurait-il fait toute sa vie ? A leur cacher qui il était vraiment ? Ce n’était pas possible, et ça aurait été un poids énorme sur ses épaules.

— Tu as bien fait de leur dire. T’as été honnête avec eux, et ils ne l’on pas accepté. Ce sont eux les fautifs. Comment tu aurais fait dans le futur ? Tu ne peux te cacher toute ta vie. C’était la seule solution que tu as eu… et maintenant il faut que tu avances. C’est dur… mais crois-moi, on s’en remet. Personne n’est assez important dans ta vie pour juger qui tu dois être.

J’avais vraiment l’air d’un autre homme, quand je parlais de ça. J’avais mon côté familier qui ressortait très peu. Mais je savais qu’un langage plus posé était de mise. Je ne pouvais faire le mec aussi nonchalant que je suis habituellement. Alors à sa dernière question, il hausse un sourcil, la question étant un peu vague, elle pouvait dire tellement de choses…

— Ce que tu dois faire, essentiellement, c’est penser à toi. Tu te sens seul, mais tu es loin de l’être. On est là pour toi, et même si on est pas ta famille… On est tous passé par une épreuve du genre et on est les mieux placés pour te comprendre. L’essentiel dans tout ça, c’est toi. Remonter la pente, penser à toi, t’accepter, et surtout te dire que ce qui arrive n’est pas de ta faute. Toi, tu es toi. Et n’importe qui n’a le droit de te reprocher ça.

J’était sincère et honnête avec lui. J’avais eu aussi du mal à m’en sortir, mais grâce aux autres qui m’ont aidé, je suis devenu celui que je suis.